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Rencontres Extra-ordinaires : « Il y a deux barrières à surmonter : le handicap et le théâtre »
Chaque année à Neuilly, nos Rencontres Extra-ordinaires réunissent des personnes en situation de handicap de la Maison d’accueil spécialisée Princesse Mathilde et une classe en formation d’aide à la personne du lycée Kandinsky. Béatrice Hénoque, enseignante en sciences et techniques médico-sociales et responsable de l’un des deux groupes de lycéennes engagés dans le projet en 2019-2020, nous fait part de son expérience.
« Cette année mon groupe était relativement ouvert. Les ateliers étaient le lundi après-midi à la MAS, je devais partir avant la fin mais le mardi je pouvais débriefer avec elles en classe entière, ce qui permettait aussi au deuxième groupe d’entendre leurs retours et d’anticiper. Chaque semaine, elles étaient plus prêtes et impatientes d’y aller !
Au début les élèves étaient un peu surprises face au handicap. Mais après l’appréhension et la stupéfaction, elles étaient très contentes de participer. Je leur en avais parlé, leur avait expliqué. On leur avait fait voir un petit film l’année dernière, elles étaient préparées psychologiquement.
Je pense que même si on les prépare, le fait d’être physiquement en contact, ce n’est pas la même chose. Là elles ont pris conscience des difficultés de communication, par exemple. Comment passer outre le handicap et arriver à créer une relation avec des personnes qu’on ne connaît pas ? C’était un peu difficile de faire tomber nos barrières. Même pour nous, adultes.
Deux barrières : théâtre et handicap
Pour le théâtre, les élèves se sentaient plus « handicapées » que les handicapés. On voit que les résidents de la M.A.S. ont l’habitude de faire ce type d’atelier. Pas nous. Dans notre éducation, lorsqu’il s’agit de théâtre, on a du mal à lâcher prise. Nous, adultes, regardions les lycéennes pour voir comment elles réagiraient. Beaucoup d’entre elles sont timides.
Je crois que ça leur a fait du bien. Ça leur servira plus tard pour les oraux. Et peut-être aussi pour travailler avec des enfants ou des personnes âgées. Il y a une élève qui était vraiment très apeurée lors du premier atelier. Elle veut être infirmière. Cette expérience va lui permettre de voir le monde du handicap plus sereinement pour son futur métier.
Les relations entre les lycéennes et les résidents de la M.A.S. étaient bonnes. Les lycéennes avaient l’impression d’avoir créé un lien d’amitié. En principe elles participent avec tous les résidents, pour connaître un peu tout le monde. Mais au débrief, il y a eu des retours : elles pensaient avoir été plus présentes pour l’une d’entre eux, et finalement c’était peut-être un peu trop…
Un monde à mieux connaître
C’était la première fois qu’elles avaient vraiment un contact professionnel avec le handicap. Cela permet de mieux comprendre le positionnement professionnel à adopter. Quelle attitude face aux résidents ? Certains peuvent être tentés de profiter du handicap pour se faire aider. Il faut savoir être bienveillant tout en conservant un cadre. Garder une certaine distance, du recul. Se donner des limites et se protéger.
Mais c’était super de les voir finalement toutes et tous avec un grand sourire, faire des choses ensemble. Cette année c’était trop court ! Le monde du handicap a besoin d’être connu et reconnu, et vu différemment. Même nous, dans en lycée professionnel, on a très peu d’occasions d’aller à sa découverte, pour des stages par exemple.
Les lycéennes ont appris plein de choses. « Ils ne sont pas si bêtes que ça », a remarqué l’une d’elle. Ici c’est un handicap moteur, pas mental. Quand on les voit la première fois, on a l’impression qu’il y a aussi le handicap mental. Puis elles ont réalisé qu’ils pouvaient communiquer intelligemment ensemble.
Il y a plein de handicaps différents, il faut vraiment se mettre auprès de la personne pour comprendre sa situation. Grâce à la bienveillance et à l’écoute. »